Le Coucou, chanteur et parasite

Coucou ! Coucou !

Ce visiteur printanier, que tout le monde reconnaît, s’annonce dès la mi-avril en chantant bien haut et bien fort le nom qu’on lui a donné. Quand la double note caractéristique du coucou résonne dans l’air, tout le monde sait bien qu’elle annonce le printemps. Le coucou mâle entonne son ‘coucou ! » de trois heures du matin à minuit, apparemment sans jamais se lasser de sa mélodie monocorde.

Les mâles arrivent avant les femelles, après un long vol en provenance de leurs quartiers d’hiver africains en lisière du Sahara. Ils se posent un peu partout, dans les bois, le long des haies, les landes, les tourbières ou les marécages. Ces coucous offrent un magnifique spectacle lors de leur vol migratoire souvent rapide : ils montent et descendent, chacun veillant sur son voisin.

Le chant du coucou est plus connu que l’oiseau lui-même, dont les ailes pointues sont faciles à confondre avec celles d’un petit faucon. Le coucou a un vol caractéristique, il tient la tête haute. Ses ailes ne s’élèvent guère au-dessus de la ligne du dos , mais descendent très bas en-dessous. Il se laisse glisser quand il quitte la cime d’un arbre pour se poser sur une prairie. Bien qu’il puisse chanter en vol, le coucou mâle attend généralement d’être perché pour émettre son cri particulier. Il lance ses deux notes, souvent à bec fermé, sa gorge enfle, il baisse la tête, ailes tombantes et il hoche la queue.

Le « coucou ! » du mâle est son meilleur moyen d’attirer une femelle en quête de partenaire. Un mâle particulièrement empressé a déjà été entendu deux cents fois de suite, ne s’étant arrêté que pour déplier ses ailes. Il ne modifie son chant que si une femelle lui répond avec un « ploup! ploup ! ploup ! » qui rappelle le glouglou d’une bouteille. Alors il ajoute une troisième note, pour lancer un « cou ! cou-cou !  » amoureux.

Des œufs de coucou ont été observés dans les nids de plus de 50 espèces d’oiseaux. Les parents nourriciers préférés sont les pics, pipits, accenteurs et rousserolles. Dès son arrivée, la femelle s’installe sur un vaste territoire. Puis elle inventorie tous les nids susceptibles d’accueillir ses œufs.

Volages, les coucous ne s’accouplent pas à vie et changent de partenaires d’une saison à l’autre. Pour attirer les mâles, la femelle se perche sur un sa branche, où elle appuie sa poitrine, imitant la couvaison sur un nid. Excités, les mâles se rassemblent sur le même arbre et attirent son attention avec force « cou-cou! cou-cou-cou! » ou « cou-cou-cou-cou ! », hochent la tête, se balancent et tournent sur place, les plumes de la queue dressées et déployées.

En vol ou de son poste de guet, la femelle surveille des nids nourriciers potentiels où les parents commencent à couver. Si possible, la femelle dépose dans chaque nid un œuf qui ressemble à celui de l’hôte. Pour devenir un parfait parasite et duper son hôte, le coucou adapte la taille et l’aspect de ses œufs, et même le comportement et la vitesse de croissance de son poussin.

Après plusieurs jours de prudente reconnaissance, la femelle choisit son nid où la ponte est encore incomplète, souvent avec un seul œuf. Toute une matinée, elle attend en surveillant ses futurs hôtes, l’œil rivé sur le nid. En général, elle pond furtivement son œuf dans l’après-midi qui suit, au moment où les propriétaires du nid sont « allés dejeuner ».

Pour ne pas attirer l’attention, la femelle du coucou fonce droit sur le nid. Elle enlève un oeuf qu’elle prend dans son bec pendant qu’elle dépose très vitre son propre œuf à la place. Parfois, elle mange l’œuf dérobé ou elle l’abandonne n’importe où. Bizarrement, quand la propriétaire légitime du nid revient, elle n’est pas étonnée par cet œuf étranger qu’elle n’essaie même pas d’enlever. Elle continue à pondre un œuf par jour, avant de commencer à couver.

La couleur et les marques des œufs imitent autant que possible ceux des œufs pondus par la femelle parasitée. Pour mieux se confondre avec ceux des hôtes, les œufs de coucous ne sont guère plus gros que ceux d’un moineau, eux-mêmes assez petits par rapport à la taille de l’oiseau. Parfois l’imitation est très imparfaite, comme avec l’accenteur moucher, dont les œufs sont bleus alors que ceux du coucou sont brun moucheté.

Les parents hôtes se démènent pour réchauffer et nourrir leur étrange invité.

Notre coucou n’est pas le seul oiseau à pratiquer le parasitisme, mais il est l’un de ceux qui l’ont perfectionné. Plus de 80 espèces d’oiseaux vivent en parasites , à des degrés divers, dont à peu près 50 espèces de la famille du coucou : les cuculidés. Ce comportement est observé chez des oiseaux prédateurs, mais aussi chez des animaux comme un canard d’Amérique du Sud, par exemple.

Bien que cela ne soit pas systématique, la femelle coucou choisit une seule espèce d’oiseaux à parasiter, chez qui elle déposera, un à un, la majorité de ses œufs. En fait, cette espèce est celle qui l’a élevée. Elle semble se souvenir des cris et chants de ces oiseaux qu’elle choisit pour sa propre progéniture.

C’est une étrange façon de montrer sa reconnaissance. En procédant ainsi, elle reproduit sa destinée initiale : l’espèce qui lui a permis de vivre fera de même avec sa descendance ! Préparée à parasiter un grand nombre d’oiseaux, la femelle coucou subit des échecs, et quand elle dépose un œuf dans un nid de linotte, cela aboutit à une catastrophe…. pour le petit coucou ! En effet, à l’éclosion, il commence à jeter les œufs par-dessus bord, selon la coutume, mais il ne connaît pas leur mode de nourriture. Or les jeunes linottes obtiennent la nourriture de leurs parents en leur pinçant le bec. Le petit coucou, qui n’a pas ce réflexe inné…..meurt de faim.

Un plumage brun sombre légèrement marqué de noir et bordé de blanc ainsi qu’une marque blanche sur la nuque : tels sont les attributs du jeune coucou. Le jeune coucou ne voit jamais ses vrais parents ? Les coucous ne sont pas aimés parce qu’ils fuient leurs responsabilités. Ils ne construisent pas de nid et font élever leurs petits par d’autres oiseaux, leurs hôtes forcés. Ils confient la couvaison et le nourrissage à un couple de parents malchanceux, qui perdent dans l’affaire toute chance d’élever leur propre progéniture. Ce parasitisme permet à la femelle de pondre jusqu’à 25 œufs, dans autant de nids pour répartir les risques. En confiant ainsi sa descendance à des parents nourriciers, elle passe moins de temps sous nos climats frais.